Refus d’autorisation pour une serre photovoltaïque : des considérations générales sur l’intérêt des EnR ne suffisent pas à caractériser une urgence en référé-suspension

Voici une nou­velle illus­tra­tion de l’im­por­tance d’ap­porter au juge des élé­ments pré­cis et cir­con­stan­ciés pour démon­tr­er l’ur­gence lorsqu’on demande la sus­pen­sion d’un refus de délivr­er une autori­sa­tion d’ur­ban­isme pour un pro­jet de pro­duc­tion d’én­ergie renou­ve­lable (TA Nîmes, ord., 9 août 2023, no 2302715).

En l’e­spèce, le groupe­ment fonci­er agri­cole (GFA Bio­plis­sy) et l’instal­la­teur de pan­neaux pho­to­voltaïques (Reden Développe­ment) avaient demandé au juge des référés du tri­bunal admin­is­tratif de Nîmes de sus­pendre l’exé­cu­tion d’un arrêté par lequel un maire avait retiré un per­mis de con­stru­ire une serre pho­to­voltaïque.

Au sou­tien de leur demande, les requérants fai­saient val­oir que la con­di­tion d’ur­gence était sat­is­faite pour les raisons suiv­antes :

  • « néces­sité de la serre pour l’exploitation agri­cole du GFA, mise à mal par les épisodes cli­ma­tiques récents » ;
  • « intérêt envi­ron­nemen­tal et énergé­tique de cet équipement col­lectif » ;
  • « la société Reden per­dra le béné­fice de l’appel d’offre auquel elle a can­di­daté le 22 juin 2023 et le béné­fice du tarif de rachat de l’électricité  ».

En défense, la com­mune soulig­nait « l’intérêt pub­lic d’éviter une instal­la­tion en zone de risque d’inondation par débor­de­ment ou ruis­selle­ment ». En effet, de jurispru­dence con­stante, le juge doit procéder à une mise en bal­ance des intérêts en présence (cf. pour une illus­tra­tion con­cer­nant l’in­térêt de réalis­er des fouilles archéologiques : CE, ord., 25 juil­let 2008, no 314707).

Au regard de ces élé­ments, le juge des référés a con­sid­éré que :

« Si le GFA Bio­plis­sy sou­tient que son exploita­tion actuelle, en plein champs et sous serre plas­tique, néces­site une nou­velle serre lui per­me­t­tant de faire face aux aléas cli­ma­tiques et de diver­si­fi­er ses cul­tures tout en répon­dant à l’objectif, d’intérêt général, de dévelop­per les éner­gies renou­ve­lables, il ne pro­duit pas, au-delà de ces con­sid­éra­tions générales, d’éléments per­me­t­tant de retenir l’incidence immé­di­ate de la déci­sion con­testée surs ses con­di­tions d’exploitation.

Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la promesse de bail à con­struc­tion con­cer­nant le ter­rain d’assiette, con­sen­tie à la société Reden Développe­ment expire au terme d’un délai de 48 mois soit le 3 mars 2024. Si cette société sou­tient qu’elle a can­di­daté à un appel d’offres de la com­mis­sion de régu­la­tion de l’énergie en vue de la fix­a­tion du tarif de rachat de l’électricité, elle ne donne pas de pré­ci­sions sur la durée d’instruction et de valid­ité d’une telle démarche.

Dans ces con­di­tions, et alors que la com­mune de Nîmes fait état de la local­i­sa­tion du ter­rain d’assiette du pro­jet dans une zone de ruis­selle­ment indif­féren­cié, la con­di­tion d’urgence ne peut être regardée comme rem­plie. Il s’ensuit que les con­clu­sions à fin de sus­pen­sion ne peu­vent qu’être rejetées. »

En défini­tive, le juge des référés a rejeté la requête pour défaut d’ur­gence.

Cette ordon­nance rap­pelle l’im­por­tance de pro­duire des élé­ments par­ti­c­ulière­ment cir­con­stan­ciés pour démon­tr­er l’ur­gence, et qu’il ne faut se borner à des con­sid­éra­tions générales (pour un exem­ple de sus­pen­sion, voir notre arti­cle : [Agri­v­oltaïsme] Sus­pen­sion du refus du maire de délivr­er un per­mis de con­stru­ire pour qua­torze abris à volailles avec toi­ture pho­to­voltaïque).


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